sábado, 8 de mayo de 2010

MOCKUS DANS LIBÉRATION

Monde 19/04/2010 à 00h00
A la présidentielle, Mockus fait son effet

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Par MICHEL TAILLE BOGOTÁ, de notre correspondant

Une paire de fesses, c’est la première chose que la plupart des Colombiens ont vue du candidat à la présidentielle Antanas Mockus, dont l’ascension bouleverse les pronostics pour le scrutin du 30 mai. Deuxième dans les sondages après un mois de campagne, ce fils d’immigrés lituaniens rêve de l’emporter dès le premier tour. Son premier geste médiatisé aurait pourtant dû enterrer sa carrière. Alors qu’il dirigeait la prestigieuse université nationale de Bogotá, le recteur s’était déculotté face à un chahut d’étudiants. Cette «forme d’expression», captée par une caméra embusquée, le pousse à la démission en 1993. Mais les Bogotans découvrent alors le reste de son anatomie - un collier de barbe et une frange monacaux qui, alliés à un discours rigoureux, lui permettent d’être élus maire deux ans plus tard.
Le diplômé de philo et de maths axe sa politique autour de principes basiques, avec des résultats contrastés mais qui lui permettent, en 2001, de rempiler à la tête de la capitale. «La vie est sacrée» , clame-t-il ; le taux d’homicides de la ville s’effondre, au prix d’une hérétique fermeture des bars à 1 heure du matin. L’argent public aussi, insiste-t-il ; ses projets sont torpillés par des conseillers municipaux habitués à monnayer leur appui. Populaire à Bogotá, il tente d’atteindre la présidence en 2006, affublé de chapeaux invraisemblables et d’un langage abscons. Il se prend une veste prévisible. Cette année, il s’est allié à deux anciens maires pour récupérer un petit parti discrédité, qui a remporté un succès d’estime aux législatives de mars. Le ralliement d’un autre mathématicien, Sergio Fajardo, ex-maire de Medellin, achève de faire mousser l’effet Mockus.
«Il dit ce qu’il pense, qualité rare dans un pays où cela reste mal vu», analyse l’éditorialiste Mauricio Vargas. Mais son image de philosophe, ajoutée à un diagnostic de début de Parkinson, l’affaiblissent face à la machinerie électorale de l’ex-ministre de la Défense Juan Manuel Santos - favori du populaire président conservateur sortant, Alvaro Uribe. Antanas Mockus, inflexible face à la guérilla, n’est pas un tendre : s’il a connu la fin de Mai 68 - il étudiait à Dijon -, ce francophile est un privatiseur d’entreprises publiques. Inquiet pour son candidat, Alvaro Uribe l’a accusé de n’avoir pas su prévenir les attentats de la guérilla contre le palais présidentiel, en 2002. Un coup bas mais pas mortel : l’ex-recteur exhibitionniste a l’habitude d’être exposé.

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